L’Institut de l’Audition accueillera prochainement une nouvelle équipe, dirigée par Keith Doelling. Nous vous proposons une présentation de Keith et de son projet.
Déjà un habitué de l’IdA où il a passé un post-doctorat, il intègre l’institut en tant que chercheur pour les 5 prochaines années.
Qui êtes-vous ?
Keith Doelling : Je suis originaire de Berkley, en Californie. J’ai passé mes premières années à jouer principalement de la musique classique et jazz, jouer au tennis et aux jeux vidéo et à étudier. J'ai commencé ma carrière de chercheur à l'Université Harvard, à y étudier comment réduire les émotions dans les souvenirs liés à la peur, ainsi que l’interaction entre la formation musicale et la dyslexie.
J’ai ensuite poursuivi par un doctorat en sciences cognitives à l’Université de New York, où j’ai testé des modèles computationnels de la dynamique neuronale dans la perception de la parole et de la musique.
Pendant cette période, j’ai créé un groupe de funk, composé de neuroscientifiques, et créé un groupe social pour les doctorants noirs à NYC, en réaction à la mort de Michael Brown à Ferguson, dans le Missouri.
Je suis ensuite arrivé pour travailler avec Luc Arnal, à l’Institut de l’Audition. J’y ai développé une plateforme pour la recherche comportementale et électrophysiologique humaine. Depuis, j’ai développé des approches computationnelles qui ont permis d’augmenter notre compréhension de la perception auditive humaine dans les domaines des interactions sensorimoteurs (fonctions sensorielles et la motricité), de la perception musicale et de l’audiologie clinique.
Peux-tu nous présenter ton projet ?
KD : Mon projet vise à utiliser des modèles computationnels, tels que l’apprentissage profond (Deep Learning) et les modèles bayésiens (approches statistiques), pour éclairer notre compréhension de la manière dont les humains intègrent les informations sonores.
L’audition humaine repose sur le traitement et l'intégration de séquences d'informations. Pour la communication, les informations que nous souhaitons véhiculer d’une personne à une autre sont trop complexes pour qu’une seule émission vocale soit suffisante à la transmission de la totalité des informations souhaitées.
Ainsi, nous transmettons des phrases et l'information est stockée à la fois dans la liste des mots générés et dans leur ordre. La perception de chaque élément est complexe et traitée à travers de nombreuses caractéristiques (hauteurs, phonèmes, structures sémantiques et forme grammaticale).
Comment ces multiples caractéristiques sont-elles perçues et intégrées pour générer une perception globale ? Comment les déficits sensoriels perturbent-ils ce processus ?
Le but de notre projet sera de suivre l'encodage neuronal, le maintien et la prédiction de ces caractéristiques dans la complexité de la perception naturelle, en utilisant diverses méthodes d’analyses, d’approches computationnelles pour analyser les enregistrements électrophysiologiques non invasifs chez l’humain. Nous utiliserons nos découvertes pour mieux comprendre comment ces systèmes complexes s’adaptent pour compenser les troubles sensoriels (comme la perte auditive), et des troubles neuronaux liés au traitement des séquences (comme l’autisme).
Quels sont tes rêves pour ton équipe ?
KD : Ce projet a le potentiel de révolutionner : autant pour l'étude de la perception humaine en neurosciences cognitives que pour le diagnostic des problèmes perceptifs et cognitifs en clinique.
Dans ces deux domaines, des résultats peuvent être obtenus en réduisant la stimulation à des paramètres courts et simples, permettant ainsi d’isoler les caractéristiques spécifiques de la perception. Bien que cette approche ait permis des avancées, les données ne reflètent pas l’expérience humaine et étudient une version simplifiée du traitement par le cerveau. Cela peut entrainer des lacunes où les patients éprouvent des symptômes dans leur vie quotidienne qui ne sont pas bien caractérisés par les outils de diagnostic actuels, ou bien des mécanismes neuronaux importants manqués, car ils n’apparaissent qu’avec une plus grande complexité.
En développant les approches computationnelles nécessaires pour suivre l’information dans des expériences naturelles complexes, je vise à combler cette lacune, non seulement pour ma propre recherche mais aussi pour la partager aux neurosciences cliniques et fondamentales.
Je suis enthousiaste à l’idée de faire partie de cette communauté et de chercher de nouveaux moyens de collaboration avec les autres équipes de l’IdA.
Souhaites-tu ajouter quelque chose ?
KD : Je tiens à exprimer ma gratitude à tous les membres de notre institut pour m'avoir accueilli si chaleureusement en tant qu'étranger et immigrant en France, pendant mon séjour à l'institut. En particulier, je remercie Luc Arnal, Diane Lazard et le reste de l'équipe ACC, qui ont été une base solide et une source de soutien incroyable lors du développement de mes propres horizons de recherche. L’ensemble de la communauté de l'IdA est une des grandes raisons pour lesquelles je suis enthousiaste à l'idée de rester et de prendre cette nouvelle aventure eux.
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